Sans une identité légale, de nombreuses personnes n’ont pas d’existence aux yeux de l’État, ce qui les prive des services essentiels pour briser le cercle vicieux de la pauvreté. Au Sénégal, la situation est particulièrement préoccupante : ceux qui vivent dans les conditions les plus précaires rencontrent souvent les plus grandes difficultés à accéder aux documents d’état civil. Face à cette réalité, les autorités ont entrepris de simplifier le processus d’enregistrement, avec un accent sur la modernisation et la digitalisation.
D’après Alioune Ousmane Sall, Directeur général de l’Agence nationale de l’état civil, l’absence de documents officiels aggrave la précarité des familles vulnérables, perturbant leur quotidien et freinant leur développement socio-économique. « Il est inadmissible de constater que certains Sénégalais, malgré leur présence physique sur le territoire national, n’existent pas sur le plan légal », souligne-t-il.
Pour tenter de remédier à cette problématique, le mouvement international ATD Quart Monde, en collaboration avec divers acteurs, a organisé la 10e Rencontre biannuelle pour la Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté, mettant en avant l’importance de l’identité légale comme levier de lutte contre la pauvreté.
Les efforts de l’État se concentrent sur la digitalisation complète du système d’état civil. Selon M. Sall, cette modernisation s’appuie sur la création d’une base de données nationale et la formation de plus de 4 000 agents à la gestion de l’état civil. « Nous avons numérisé environ 20 millions d’actes et continuons le rattrapage des 10 millions restants », précise-t-il.
Cependant, El Hadji Oumar Guèye, allié d’ATD Quart Monde, déplore les insuffisances du système : « Les familles ont du mal à trouver des interlocuteurs et à naviguer dans les procédures. Ce sont souvent celles qui mènent une vie extrêmement difficile qui sont les plus affectées. » Pour lui, une sensibilisation accrue des familles et un soutien des autorités sont nécessaires pour permettre à chacun d’accéder aux droits fondamentaux, tels que l’enregistrement à l’état civil.
Dans cette optique, une table ronde a été proposée pour rassembler les parties prenantes afin de définir une approche collective. L’objectif est de trouver des solutions pérennes à ce problème qui condamne tant de Sénégalais à l’invisibilité.
Malgré les défis, l’État poursuit son engagement en collaborant avec l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD) et la Direction des affaires civiles. La numérisation vise à sécuriser le processus, faciliter l’accès aux services via téléphone ou ordinateurs, et assurer une interconnexion avec d’autres systèmes comme la santé ou la carte d’identité. À terme, cela permettrait non seulement de réduire la fraude documentaire, mais aussi de garantir la traçabilité et l’interopérabilité des services publics.