Un an de gouvernance Diomaye-Sonko : entre audits, reddition des comptes et tensions sociales

Le 24 mars 2024 marquait l’avènement d’une nouvelle ère politique au Sénégal avec l’élection de Bassirou Diomaye Faye à la présidence, obtenant plus de 54% des suffrages. Soutenu par son mentor, Ousmane Sonko, nommé Premier ministre avec des pouvoirs renforcés, le nouveau régime s’est engagé dans une vaste opération de déconstruction du « système Sall ». Un an plus tard, cette dynamique de rupture s’est traduite par une série d’actions majeures, notamment la reddition des comptes, les audits des finances publiques et la révision des attributions foncières, mais les urgences sociales restent prégnantes.
Audits et enquêtes : le régime passe au crible la gestion Sall
Le nouveau pouvoir a rapidement mis en place un contrôle strict des finances publiques. Ousmane Sonko, dans une conférence de presse, a accusé l’ancien régime d’avoir falsifié les chiffres économiques du pays. La publication du rapport de la Cour des comptes a confirmé une dette publique plus élevée qu’annoncé, ce qui a entraîné une dégradation des notes souveraines du Sénégal. Une délégation du Fonds monétaire international (FMI) s’est rendue à Dakar le 18 mars pour évaluer la situation et envisager une relance du programme 2023-2026, suspendu en raison des incertitudes économiques.
Parallèlement, le Pool judiciaire financier a multiplié les auditions et les mandats de dépôt pour des dossiers de présumés détournements de fonds publics. Parmi les personnalités visées figurent Farba Ngom, Tahirou Sarr, Lat Diop et Tabaski Ngom, avec d’autres arrestations en préparation. Cette chasse aux infractions financières, perçue comme une priorité du nouveau pouvoir, suscite cependant des interrogations sur son impact économique à moyen terme.
Un climat social tendu : grèves et difficultés économiques
Malgré ces efforts de transparence et de lutte contre la corruption, le gouvernement doit faire face à une situation sociale délicate. Une vague de grèves a secoué le pays ces dernières semaines, témoignant du malaise persistant au sein des différents secteurs. Hausse des prix, licenciements massifs, détérioration du pouvoir d’achat, restrictions des libertés et pression sur les médias figurent parmi les griefs exprimés par la population. Le Plan de stabilité sociale, annoncé pour apaiser les tensions, suscite des attentes mais aussi des doutes quant à sa mise en œuvre et son efficacité à long terme.
Une loi d’amnistie controversée
Dans ce contexte, une proposition d’interprétation de la loi d’amnistie, initiée par Amadou Bâ 2, a été soumise au Parlement. Ce projet prévoit un décaissement de 5 milliards de francs CFA pour indemniser les victimes des violences politiques entre 2021 et 2024. Toutefois, la mesure fait l’objet de vives protestations, certaines voix redoutant qu’elle ne serve à absoudre certaines responsabilités politiques. Le vote est prévu pour le 2 avril, une date qui pourrait marquer un tournant dans la gestion de la crise politique actuelle.
Un cap maintenu sur la rupture, mais jusqu’à quand ?
Fidèle à son engagement de rupture, le tandem Diomaye-Sonko maintient le cap sur la transparence et la refonte du système hérité de Macky Sall. Cependant, les défis restent nombreux : la stabilisation économique, la satisfaction des revendications sociales et la gestion des tensions politiques. Si la stratégie de rupture a jusqu’ici consolidé la base du parti Pastef, elle pourrait être mise à l’épreuve par l’impatience d’une population en quête de solutions concrètes.