Suspension de l’aide américaine : La décision de Donald Trump est aussi une bonne nouvelle pour le Sénégal

Le gel de l’aide publique au développement par le président américain Donald Trump pour une durée de 90 jours a surpris et secoué plusieurs pays, notamment ceux du continent africain. Cette mesure pourrait avoir des répercussions économiques et diplomatiques significatives pour les pays pauvres qui bénéficient de cette aide. Cependant, cette décision pourrait s’avérer bénéfique à long terme pour le Sénégal et d’autres nations africaines, en particulier pour celles qui aspirent à une souveraineté économique plus forte et à des partenariats équilibrés. Cette décision, contraignant aux premiers abords, pourrait pourtant permettre au Sénégal de tirer parti de cette situation.

La première bonne nouvelle que cette décision de Donald Trump représente pour le Sénégal réside dans l’affirmation du rôle de souverainisme dans les politiques économiques. Pour des dirigeants comme le Premier ministre Ousmane Sonko, qui prônent la souveraineté nationale dans la gestion des ressources et la politique économique, cette décision pourrait être perçue comme un alignement stratégique. En effet, Donald Trump se positionne comme un adversaire des pratiques qui maintiennent les pays africains dans une dépendance économique vis-à-vis des aides extérieures, souvent jugées inefficaces et déconnectées des réalités locales.

Papa Demba Thiam, économiste sénégalais, évoque ainsi les fondements de cette position stratégique. Trump, selon lui, déteste « la fabrique de pauvreté institutionnalisée » par les organisations multilatérales, qu’elles soient bilatérales ou multilatérales. Ce raisonnement rejoint les aspirations des pays africains, comme le Sénégal, qui souhaitent se détacher des aides conditionnelles et opter pour des partenariats où la gestion des ressources et des projets repose sur une coopération plus équilibrée. Pour le Sénégal, un tel contexte offre l’opportunité de reprendre les rênes de son développement économique et de promouvoir une vision plus autonome.
Vers une dynamique d’affaires gagnant-gagnant
Un autre aspect positif de cette décision est que Donald Trump gouverne selon une logique de rentabilité économique, semblable à celle du secteur privé. Cette approche peut s’avérer avantageuse pour les pays africains désireux de nouer des partenariats où les bénéfices sont partagés de manière équitable. L’économiste Papa Demba Thiam soutient que si les pays africains, comme le Sénégal, réussissent à développer des stratégies économiques solides, ils pourraient devenir des partenaires respectés et dignes de confiance pour les investisseurs internationaux.

Le principe d’une relation « gagnant-gagnant », selon Thiam, pourrait redéfinir les relations commerciales entre l’Afrique et les États-Unis, et plus généralement avec les puissances mondiales. Pour le Sénégal, cela pourrait signifier des investissements étrangers dans des secteurs stratégiques comme l’agriculture, l’industrie ou les infrastructures, tout en renforçant la capacité des entreprises locales à s’intégrer dans des chaînes de valeur internationales. Cela favoriserait un développement inclusif, soutenu par des initiatives privées plutôt que par une dépendance excessive aux aides publiques.
L’État-stratège : une vision pour le développement
Un des principaux enseignements de cette décision est la nécessité pour le Sénégal de se positionner en tant qu’État-stratège, capable de planifier et de diriger le développement économique de manière autonome. Papa Demba Thiam insiste sur le fait qu’il est illusoire de croire qu’un gouvernement doit financer lui-même tout le développement. Au contraire, un gouvernement efficace doit savoir orienter l’investissement privé en offrant des opportunités d’affaires irrésistibles à des investisseurs nationaux et étrangers. Ce modèle économique encourage une plus grande responsabilisation des secteurs privés locaux et internationaux dans le processus de développement, réduisant ainsi la dépendance vis-à-vis des aides publiques.

Pour le Sénégal, cela signifie qu’il doit s’appuyer sur une gestion efficace des ressources et sur la création de secteurs attractifs pour les investisseurs. En privilégiant des projets de développement à fort potentiel de rentabilité, le pays pourrait se positionner comme un hub économique régional en Afrique de l’Ouest, capable d’attirer les financements nécessaires à son développement.
Un virage vers des chaînes de valeurs intégrées
Enfin, la décision de Trump souligne l’importance des chaînes de valeurs nationales et régionales dans le développement économique. Selon Papa Demba Thiam, l’argent public doit être utilisé pour libérer les forces de la croissance inclusive qui se produisent sur des chaînes de valeurs convergentes, tant au niveau national que régional. Cette approche pragmatique, loin des logiques de financement externe, pourrait bien correspondre aux priorités du Sénégal, qui cherche à renforcer ses infrastructures et à développer des secteurs stratégiques comme l’énergie, les transports et l’agriculture.

Dans ce contexte, le Sénégal pourrait intensifier ses efforts pour développer des projets intégrés au niveau régional, notamment dans le cadre de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), et ainsi bénéficier des synergies créées avec d’autres pays de la région. Cela offrirait un modèle de développement plus cohérent et résilient, moins dépendant des fluctuations des aides publiques internationales.