Vingt-cinq ans après les inondations dévastatrices de 1999, les villages situés le long du bassin du fleuve Sénégal subissent à nouveau la colère des eaux. La montée du fleuve Sénégal, particulièrement intense cette année, ravage tout sur son passage. Pour la première fois depuis les événements de 1999 qui avaient englouti de nombreuses villes, dont le village de Donaye, le Plan Orsec a été activé.
C’est lors d’un « live » politique nocturne que le Premier ministre a annoncé une aide de 8 milliards de F CFA aux sinistrés, une annonce en demi-teinte au milieu d’un appel à la mobilisation de ses partisans pour les Législatives du 17 novembre prochain. Parallèlement, le Président Faye a tenté de montrer la compassion de l’État, mais sans préciser l’enveloppe dédiée aux victimes. Il est attendu aujourd’hui à Kédougou, alors que la catastrophe, après avoir frappé Bakel, se déplace vers le Nord, touchant Podor, Dagana et bientôt Saint-Louis.
À Bakel, la situation est critique : plus de 90% des périmètres irrigués, abritant des cultures de riz, de sorgho et de maïs, ont été submergés, d’après la SAED. Dans le département de Podor, 500 hectares sont également sous les eaux, selon le Gouverneur de Saint-Louis. Cette destruction des cultures menace gravement la sécurité alimentaire de milliers de familles qui dépendent de ces terres pour leur subsistance.
Les autorités administratives se rendent sur les lieux sinistrés, mais l’État a-t-il pleinement pris la mesure de cette crise ? La gestion actuelle des secours rappelle celle de l’ouragan Katrina aux États-Unis, marquée par des retards de réponse et des impacts durables. « Ce qui m’inquiète, c’est l’après-inondation. Les sources d’eau sont contaminées, les habitats insalubres. Nous risquons des épidémies », prévient un fonctionnaire ayant accompagné une délégation à Matam. « Les autorités viennent les mains vides, sans apporter de soutien concret, juste des paroles de réconfort », ajoute-t-il.
La situation est alarmante dans le Nord, où plus de 900 familles se retrouvent sans eau potable ni sanitaires adéquats. « Comment a-t-on pu négliger les leçons des crues de Bakel ? », s’interroge ce même fonctionnaire, bouleversé par la détresse des populations locales. Malgré les avertissements de l’OMVS sur les risques de crue exceptionnelle, aucune mesure préventive n’a été mise en œuvre, que ce soit le relogement des habitants ou l’installation d’abris provisoires. Pendant ce temps, la visite du Président à Kédougou laisse perplexe.
En 1999, après des années de sécheresse, le Sénégal avait été frappé par des inondations sans précédent. Les fortes pluies avaient provoqué la submersion de plusieurs villes, poussant les populations à quitter leurs maisons pour s’installer dans des conditions précaires. La mise en place du Plan Orsec visait alors à répondre à l’urgence, mais les mêmes erreurs semblent se répéter aujourd’hui. « Si le Président se rend à Bakel ou Matam, il comprendra l’ampleur de la catastrophe et activera le Plan Orsec. C’est ce que nous espérons tous », confie le fonctionnaire, marqué par les scènes de désespoir qu’il a observées.