De Kolda à Ziguinchor, en passant par Dakar, la jeunesse sénégalaise s’élance dans une quête effrénée pour saisir l’opportunité de travailler en Espagne. Entre espoir d’un avenir meilleur et frustration face à des démarches complexes, les scènes aux Baos et tribunaux traduisent une réalité poignante.
Dans les 14 régions du Sénégal, des milliers de jeunes se ruent vers les Bureaux d’Accueil, d’Orientation et de Suivi des Sénégalais de l’Extérieur (Baos) et les tribunaux. Leur objectif : déposer leurs dossiers pour participer au programme de migration circulaire qui leur offre une chance de travailler temporairement dans le secteur agricole espagnol.
À Kolda, les locaux du Baos ont été envahis dès l’aube. Garçons et filles, souvent venus de villages éloignés, se bousculaient pour soumettre leurs candidatures. La scène était marquée par une effervescence mêlée d’angoisse. Dienabou Sabaly, jeune femme au dossier incomplet, témoigne : « Je dois chercher coûte que coûte le papier manquant. Cette opportunité est mon espoir de changer ma vie. »
Les candidats doivent réunir des documents essentiels : passeport, certificat médical et casier judiciaire. Obtenir ce dernier est un véritable parcours du combattant. Au Tribunal de Kolda, l’attente interminable et les bousculades reflètent la pression immense sur ces jeunes. Samba Diamanka, frustré, explique : « On nous fait attendre à l’extérieur, car l’intérieur est bondé. Mais je suis prêt à patienter, car je n’ai pas le choix. »
À Ziguinchor, la situation n’est guère différente. Les bureaux du Baos sont saturés. Certains candidats remplissent leurs formulaires dans la rue, tandis que des femmes affirment leur détermination face aux défis. « Il n’y a pas de travail ici. Si une opportunité se présente, il faut la saisir », déclare une jeune femme, dossier en main.
À Dakar, le Tribunal de Pikine-Guédiawaye fait face à un afflux massif. Les jeunes, désabusés, dénoncent une politique économique défaillante. Ousmane Bâ, candidat au programme, souligne : « Cela montre l’échec des politiques publiques. Nous n’avons pas d’avenir ici. »
Ce programme, fruit d’un partenariat entre l’Espagne et le Sénégal, est perçu comme une lueur d’espoir. Pour Mamadou Diallo, 34 ans : « Ce contrat représente une opportunité de transformer ma vie et celle de ma famille. Je suis prêt à faire le nécessaire. »
Cependant, l’effervescence révèle également une autre réalité : la fuite massive des jeunes en quête d’un avenir qu’ils ne parviennent pas à entrevoir dans leur propre pays. Entre amertume et espoir, ces scènes reflètent l’urgence d’une prise de conscience pour une politique tournée vers la jeunesse.