Ils ont pour mission de collecter les données sur la situation alimentaire et les signes de pauvreté à travers le pays. Pourtant, les enquêteurs affichent maintenant les difficiles conditions de leur travail et se déclarent eux-mêmes dans une situation d’insécurité financière et sociale.
Les enquêteurs recrutés pour réaliser différentes enquêtes portant sur des questions aussi diverses que la sécurité alimentaire, les questions démographiques ou la situation écoenvironnementale à travers le pays, pour le compte du Secrétariat exécutif du Conseil national de sécurité alimentaire (Se-Cnsa), commencent à voir rouge. Pour la plupart des étudiants ou de jeunes universitaires sans emploi, ces enquêteurs, recrutés par appel à candidatures, sont, après une formation de quelques jours pour les initier aux enquêtes qu’ils doivent mener et aux instruments qu’ils doivent utiliser pour leur faciliter la tâche, répartis à travers le pays, sous la supervision d’un responsable employé par le Se-Cnsa, afin de recueillir les données auprès des populations cibles.
Les résultats qu’ils collectent sont également utilisés par l’Agence nationale de la statistique et la démographie (Ansd) pour ses publications. Cela montre à quel point leur travail est important et qu’ils méritent qu’on leur accorde de la considération.
Pourtant, la dernière cohorte des enquêteurs se plaint de n’avoir pas reçu leur pécule depuis le mois d’octobre. Et, les montants en jeu ne sont pas extraordinaires, si l’on sait que chacun d’eux perçoit 15 000 francs Cfa par jour. Le superviseur, pour sa part, perçoit en principe 20 000 francs Cfa par jour de travail. Et les jours de travail sur le terrain ne dépassent pas souvent 15.
Généralement, ces recrutés percevaient la moitié de leur pécule à l’entame de leur mission, pour leur permettre de subvenir à leurs besoins immédiats, et de se nourrir, en cas de nécessité. Pourtant, cela n’a pas été le cas cette fois-ci. Il leur avait été promis que leur dû leur serait versé intégralement à la fin de leur mission.
«Nous nous sommes retrouvés dispatchés dans des zones éloignées, parfois dans des endroits éloignés de toute agglomération, sans aucune prise en charge. Une fois que le véhicule vous a déposé sur le terrain, vous êtes laissé à vous-même jusqu’à ce que l’on vienne vous reprendre. Personne ne se préoccupait de savoir si on avait mangé ou si même on avait de l’eau à boire», se désole l’un de ceux qui ont parlé au journal Le Quotidien.
Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, les enquêteurs ont accompli les tâches qui leur étaient demandées. Mais à la fin, leur surprise a été grande d’apprendre qu’ils ne pouvaient pas être payés. Le motif ? L’argent, qui provient d’un financement de la Banque mondiale, n’aurait pas été viré parce que les concernés ne disposeraient pas de compte bancaire. Ce qu’a confirmé le responsable de la communication du Se-Cnsa, qui affirme que «dès le début de la formation, la Banque mondiale avait tenu à préciser que tous les enquêteurs devraient ouvrir des comptes bancaires pour pouvoir se faire virer leurs paiements. Le Cnsa n’est pour rien dans cette situation».
Mais les concernés balaient ce qu’ils considèrent comme une contre-vérité. «C’est vrai que la Banque mondiale avait exigé que tous les concernés aient des comptes bancaires. Même les prestataires et les fournisseurs devaient disposer de comptes. Et tout le monde s’est acquitté de cela. Mais la Banque mondiale a versé l’argent au Phasaoc (Projet d’harmonisation et d’amélioration des statistiques de l’Afrique de l’Ouest et du Centre), qui est logé au niveau de l’Ansd. Et les responsables de ce projet rejettent les retards au Se-Cnsa. Ce qui est avéré, c’est que personne n’a encore encaissé un seul sou dans son compte bancaire. Et on ne sait pas pourquoi.»
Certains responsables se demandent si ces conditions, des blocages qui n’existaient pas avant, peuvent encourager les enquêteurs à faire leur travail, si nécessaire pour que les décideurs aient la maîtrise de la situation alimentaire et de la protection sociale à travers le pays.
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