La situation économique du Sénégal connaît un tournant préoccupant avec la récente dégradation de sa note souveraine par l’agence de notation Moody’s. Cette décision, qui intervient après la publication du rapport de la Cour des comptes sur la gestion des finances publiques sous Macky Sall, met en lumière les difficultés économiques auxquelles le pays devra faire face dans les mois à venir.
Le 4 octobre 2024, à la suite des déclarations du Premier ministre Ousmane Sonko dénonçant une situation financière bien plus alarmante que prévue, Moody’s avait déjà rétrogradé la note du Sénégal de Ba3 stable à B1, sous surveillance. Quelques jours plus tard, le 18 octobre 2024, l’agence Standard & Poor’s avait également revu sa perspective sur le pays en la classant « négative », bien qu’elle ait maintenu sa note B+.
Mais le coup de grâce est survenu le 12 février 2025, après la publication du très attendu rapport de la Cour des comptes. Ce document a révélé un déficit public avoisinant les 100 %, confirmant les inquiétudes du gouvernement. En réaction, Moody’s a abaissé de deux crans supplémentaires la note du Sénégal, la faisant passer à B3 avec une perspective « négative ». Selon les experts économiques, cette classification signifie que le risque du Sénégal est désormais très élevé, compliquant toute tentative de lever des fonds sur les marchés financiers sans accepter des taux d’intérêt exorbitants.
En octobre dernier, le Sénégal avait levé un Eurobond à un taux record de 7,5 %, une opération réalisée sans l’aval du Fonds monétaire international (FMI) et entourée d’une certaine opacité. Cette situation pourrait se compliquer davantage, car le pays doit prochainement négocier un nouveau programme avec le FMI. Or, les déclarations des dirigeants sénégalais, qui se revendiquent « souverainistes » et affirment pouvoir se passer des institutions de Bretton Woods (Banque mondiale et FMI), pourraient poser un obstacle à ces négociations.
Malgré les critiques à son encontre, le FMI offre une garantie de transparence et de contrôle qui rassure les investisseurs et permet d’accéder à des financements à des taux plus abordables. Sans cet appui, le Sénégal pourrait voir ses marges de manœuvre financières se restreindre considérablement.
La situation actuelle met en évidence un enjeu majeur : la gestion des finances publiques ne peut être dictée par des déclarations politiques. Depuis 2019, la note souveraine du Sénégal n’avait été dégradée qu’une seule fois, en août 2020, en raison des effets de la pandémie de Covid-19. Elle s’était redressée en deux ans, malgré des tensions politiques. Aujourd’hui, cette nouvelle chute de la notation, plus sévère encore que celles enregistrées depuis 2010, souligne l’urgence de restaurer la confiance des investisseurs et d’adopter une stratégie économique plus rigoureuse et moins impulsive.